Pensée positive vs psychologie positive
Dans les accompagnements, une injonction du type « pense positif » peut, au mieux, soulager sur l’instant… mais au pire, nier le vécu, culpabiliser (« si tu vas mal, c’est que tu n’essaies pas assez ») et empêcher l’apprentissage d’outils de régulation. La psychologie positive, elle, est un champ scientifique qui étudie les conditions du bien-être durable, de l’engagement, du sens et du fonctionnement optimal chez l’individu et dans ses contextes (famille, école, travail). Elle ne gomme pas le négatif : elle lui donne une place juste et apprend à composer avec.
2025-10-20 10:25:54 - Marina Ardouin
Par Marina Ardouin, psychopédagogue
« Sois positif, sinon tu vas t’enfoncer. »
« Tu attires ce que tu vibres. »
« Relativise, ça pourrait être pire. »
Sur le papier, ces phrases sonnent simple. Dans la réalité d’un esprit anxieux, d’un cœur surchargé ou d’un quotidien douloureux, cela peut résonner de façon vide, voire violente.
Et c’est là qu’un glissement subtil mais fondamental s’opère : entre pensée positive et psychologie positive, les mots sont proches, l’intention parfois aussi. Mais l’une est une posture mentale, l’autre une science rigoureuse. Et les confondre, c’est risquer d’invalider l’expérience de l’autre… ou de soi-même.
Alors prenons le temps de clarifier. Parce que c’est de vous, de votre fonctionnement, et de votre liberté intérieure qu’il s’agit.
Deux concepts, deux logiques
La pensée positive : une posture mentale
C’est l’idée selon laquelle il suffirait de « penser autrement » pour aller mieux. En pratique, cela passe souvent par :
- des affirmations répétées (" L’univers conspire à ma réussite "),
- des recadrages rapides, ("Sois positifve, tu vas tout déchirer")
- des visualisations idéalisées. ("Ferme les yeux, imagine-toi dans un avenir radieux. Tout se passe parfaitement. Tu es serein, tout est facile, fluide. Visualise-toi atteignant tous tes objectifs sans difficulté. Tu te sens en pleine forme, entouré de personnes bienveillantes. Rien ne peut t’arrêter".)
L’intention est louable : éviter de sombrer, rebooster son moral, apaiser temporairment ses émotions. Mais la méthode peut être prescriptive, déconnectée du contexte, et surtout, elle repose sur un bypass émotionnel : " je me sens mal ? J’efface. "
Or, zapper, passer à autre chose n’est pas réguler.
La psychologie positive : une démarche scientifique
Apparue dans les années 2000 sous l’impulsion de chercheurs comme Martin Seligman et Barbara Fredrickson, la psychologie positive ne cherche pas à " positiver " quoi que ce soit. Elle étudie, de façon rigoureuse, les conditions d’un bien-être durable et du fonctionnement optimal de l’être humain : émotions, engagement, sens, relations, accomplissement, santé.
Elle s’appuie sur :
- des protocoles validés scientifiquement (forces de caractère, gratitude, actes prosociaux, buts personnels alignés),
- des mesures d’impact (avant/après, sur le bien-être, les affects, les compétences émotionnelles…),
- une intégration du réel, y compris de ses aspérités : stress, souffrance, doutes, conflits.
Ici, on n’évite pas le « négatif ». On l’apprivoise. On apprend à composer avec. On développe des compétences transférables.
Rapport au réel : éviter la tyrannie du « tout va bien »
La pensée positive, lorsqu’elle est mal dosée ou mal comprise, peut nous imposer un filtre : ne voir que le " beau ", le "bon ". Si on traverse une période difficile, si on se sent débordé, fatigué, injustement traité, l’injonction à « positiver » peut devenir une forme de négation de soi.
La psychologie positive, elle, n’idéalise pas : elle vise un réalisme nuancé. Elle propose d’accepter le contexte, d’y puiser des leviers concrets, et d’augmenter peu à peu notre capacité à faire face, à créer, à apprécier, à relier.
C’est ce que Barbara Fredrickson appelle le modèle "broaden and build " : les émotions positives élargissent notre champ de vision… mais seulement quand elles sont authentiques et enracinée, c'est la théorie de l'élargissement et de la construction
Temporalité : la vérité du temps long
La pensée positive peut nous faire du bien dans l’instant... comme un joli pansement sur une égratignure. Mais face à un traumatisme, un burn-out, un conflit chronique ou une estime de soi cabossée, cela ne suffit pas.
La psychologie positive travaille autrement :
- sur le long terme,
- par micro-changements réguliers,
- avec des rituels réalistes,
- et des retours constructifs.
Elle fait le pari de la progression, pas de la perfection.
Éthique : sortir de l'injonction au bonheur
L’un des risques majeurs de la pensée positive, c’est cette idée insidieuse :
"Si tu vas mal, c’est que tu n’as pas assez essayé. "
Ce discours peut être extrêmement violent, surtout pour les personnes anxieuses
La psychologie positive, bien utilisée, ne prescrit pas un modèle de bonheur universel. Elle part de toi : ton fonctionnement, ton environnement, tes valeurs, ta trajectoire. Elle ne dit pas : " tu dois être heureux ", mais :
" explorons ce qui te fait du bien, à toi, ici et maintenant, en respectant ton énergie, ton rythme, ton histoire. "
Ce que dit la recherche (en bref)
Les études montrent des effets significatifs (petits à modérés) des interventions de psychologie positive sur le bien-être et la diminution des symptômes dépressifs, avec des différences selon les formats, la durée et les publics. Autrement dit : ce n’est pas magique, c’est efficace quand c’est bien ciblé, suivi et répété
Important : viser " le plus de positif possible " comme le propose la pensée positive peut aussi avoir des effets contre-productifs (pression à être heureux, déconnexion du réel). C’est ce que les chercheurs appellent le côté sombre du bonheur : lorsque la quête de la joie devient une injonction, quand on en fait un objectif rigide. La boussole, ici, c’est l’ajustement (lucide, contextuel), pas l’euphorie permanente. Cette injonction est très présente sur les réseaux sociaux et dans la littérature du développement personnel (Mettre des paillettes dans votre vie, faire des listes, vous répétez chaque jour que vous êtes une reine, et vous lever à l'aube ne résoudra pas vos problèmes!)
En synthèse
La pensée positive cherche à colorer la réalité.
La psychologie positive t’apprend à composer avec elle lucidement, durablement, et avec respect.
Et moi, dans tout ça ?
Je suis psychopédagogue
Je n’édulcore pas. Je n’impose pas.
J’accompagne, avec rigueur, humanité, curiosité, et un soupçon d’humour (aussi!) quand il faut dénouer l’angoisse avec délicatesse.
Pour aller plus loin
- Seligman, M. (2002). Authentic Happiness.
- Fredrickson, B. L. (2004). The broaden-and-build theory of positive emotions.
- Sin & Lyubomirsky (2009). Enhancing well-being and alleviating depressive symptoms with positive psychology interventions.
- Gruber, J., Mauss, I. B., & Tamir, M. (2011). A dark side of happiness?
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(illustration de ce texte générée par IA)